Accompagner les jeunes en transition pour leur permettre de s’ouvrir au monde

La transition de genre est un parcours sinueux et difficile pour celles et ceux qui veulent affirmer et vivre leur identité de genre. Les adolescent·e·s transgenres font face à de nombreux obstacles.

Quatre d’entre elles et eux habitent depuis 2022 dans trois de nos foyers. Nos éducatrices et éducateurs ont fait et font encore leur possible pour leur offrir un environnement respectueux de leur identité dans lequel elles et ils se sentent soutenu·e·s et puissent pleinement s’épanouir. Toutes nos équipes s’efforcent de les accompagner au mieux dans une période très délicate de leur vie.

Rejet et isolement

Les adolescent·e·s en transition doivent en effet faire face à de multiples difficultés. Parfois rejeté·e·s par leur famille, elles et ils sont entraîné·e·s dans des conflits qui les poussent à s’isoler alors que l’acceptation et le soutien de leurs proches sont essentiels à leur développement. Les discriminations sont souvent le fait de leur entourage et notamment leurs pairs. Elles et ils peuvent être simplement ignoré·e·s par les personnes de leur âge, voire harcelé·e·s. Cela se répercute sur leur estime de soi, leur confiance et leur bien-être émotionnel, les conduisant à un isolement social prononcé. Ces adolescent·e·s ont du mal à trouver des espaces ou des amitiés sûrs dans lesquels elles et ils puissent se sentir pleinement accepté·e·s. Ces situations peuvent alors générer des dépressions, de l’anxiété et des idées suicidaires à des taux plus élevés que la moyenne de leur âge. Leur équilibre psychologique est touché, ce qui entraîne de profondes conséquences sur leur parcours scolaire et leur vie entière.

Écoute et remise en question des valeurs

Malgré toute leur bonne volonté et leur disponibilité, nos éducatrices et éducateurs, qui ont découvert cette nouvelle réalité et ont dû l’intégrer à leur pratique professionnelle, ont été déstabilisé·e·s par l’arrivée de jeunes en transition de genre dans les foyers.

Cette thématique, qui n’était auparavant pas aussi courante, n’avait jamais été abordée durant leurs études ou lors de formations continues. Les équipes se sont adaptées en lisant de la littérature spécialisée et en discutant avec des professionnel·le·s de la santé. En 2022, une formation spécifique d’une journée leur a été dispensée par la fondation Agnodice. Elle a souligné les enjeux d’une transition de genre. Agnodice soutient les enfants et adolescent·e·s non binaires, mais aussi les professionnel·le·s amené·e·s à s’en occuper. Elle a beaucoup insisté sur l’écoute et la remise en question des valeurs comme premières étapes sur le chemin de la compréhension. Cette formation a permis d’avoir plus de recul sur les expériences et les défis auxquels ces jeunes sont confronté·e·s.

Des transformations sociétales très rapides

Nos éducatrices et éducateurs ne sont pas seul·e·s au contact des adolescent·e·s en transition. Un réseau de professionnel·le·s de santé spécialisé·e·s dans les questions de genre et de diversité sexuelle les accompagnent également. Ces médecins, assistantes sociales, assistants sociaux ou psychologues leur assurent un encadrement complet et personnalisé, mais offrent aussi un soutien à nos équipes. Ainsi, des psychologues externes suivent certains profils en supervision conjointe avec l’un·e ou l’autre de nos encadrant·e·s. 

C’est un bénéfice pour nos éducatrices et éducateurs qui ont eu tendance, lors de l’arrivée des premières adolescentes et premiers adolescents en transition dans les foyers, à les voir de la même manière que les autres jeunes. Ce n’est pourtant pas tout à fait le cas. Des difficultés concrètes s’ajoutent.

Ainsi, avant l’arrivée d’un jeune homme en transition, la Direction lui a téléphoné pour savoir comment il voulait être appelé et lui demander s’il fallait annoncer sa transition aux autres habitants. Ce dernier point est important pour l’équilibre de la structure. Les adolescent·e·s déjà installé·e·s n’en font pas grand cas si on les a prévenu·e·s en avance même si de petites tensions peuvent subsister. 

La cohabitation a pu soulever des interrogations pratiques. Un autre jeune homme en transition a emménagé à l’étage des garçons. Or les adolescents se sentaient gênés de sortir le soir en caleçons pour aller aux toilettes. Pour limiter les possibles frictions, il a donc été décidé d’abolir les séparations garçons-filles puisque cela ne paraissait plus pertinent à l’aune de la question de genre. Ce changement effectué, la vie quotidienne a poursuivi son cours.

Cette répartition par genre, qui a structuré les foyers mixtes depuis toujours, semblait intangible. Son abandon rapide souligne la vitesse des transformations sociétales et a pu en désarçonner quelques éducatrices ou éducateurs.

Une reconnaissance immédiate ?

Une question importante taraude le monde éducatif et suscite un grand débat : faut-il donner immédiatement une reconnaissance sociale à cette volonté de transition ? Au sein des foyers, celle-ci a été soulevée dans les équipes qui se sont quelquefois demandé si tout n’allait pas trop vite pour les jeunes, qui peuvent douter, mais aussi pour les parents, qui sont mis devant un fait accompli pas toujours évident à accepter. Il faut les accompagner pour faire subsister le lien qui les unit à leur enfant. Ils doivent être tenus au courant tout en préservant l’intimité de l’adolescent·e. Le corps médical, pour sa part, trouve parfois à juste titre que les parents ne comprennent pas suffisamment les souffrances endurées par ces jeunes. L’an passé, nos éducatrices et éducateurs ont dû jongler entre toutes ces parties.

Si la transition occupe le plus clair de leurs pensées, ces adolescent·e·s doivent en plus construire leur avenir, suivre leur scolarité et assurer leur équilibre psychique. C’est exactement la mission de nos éducatrices et éducateurs. Elles et ils peuvent revenir alors aux fondamentaux de leur métier : aider les jeunes à découvrir leur identité et à s’épanouir.

Jeunes en transition: conseils & accompagnement

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